Un jour viendra ¤ Giulia Caminito

« On l’appelait l’enfant mie de pain parce qu’il était le fils du boulanger et qu’il était faible, il n’avait pas de croûte, laissé à l’air libre il moisirait, bon ni pour la soupe ou le pancotto, ni pour nourrir les poules. » 

 

Dans la région des Marches à l’est de l’Italie, un petit village se dresse taillé dans la pierre, surplombé par un monastère silencieux. Entre les murs qui embrassent la fraîcheur, l’abbesse, une Soudanaise arrachée à sa famille et son pays, règne et veille sur les moniales. Au village, Lupo Ceresa, fils du boulanger, effronté et sanguin, se rapproche des anarchistes. Sur ses talons, un frère au visage de prince qui ne lui ressemble pas: Nicola, l’enfant mie de pain, peureux, fragile, bancal. 

Une révolte gronde sur les pavés, une grande guerre se déclare, les jeunes hommes envoyés au front. Les moniales, menacées d’expulsion par l’Eglise, se rassemblent derrière la figure grandiose de l’abbesse.  Dans la maison sombre des Ceresa dort un secret de famille, sorte de pain au levain dans le four ou de ventre chaud d’ours au fond d’une grotte, gonflant et gonflant, dont l’odeur s’immisce dans les meubles, menaçant de les faire craquer comme le ferait l’humidité. 

« Le lit était étroit et court, les draps et les couvertures jamais assez nombreux, et pour dormir au chaud ils devaient se mettre l’un sur l’autre, pareil aux deux moitiés d’une pomme, encore sur l’arbre. »

Ah que l’Italie va bien aux éditions Gallmeister !

Coup de cœur pour ce roman italien au goût petit épeautre. L’histoire d’une Italie rurale déchirée entre les révoltes sociales, les affrontements contre l’Autriche et l’avancée du fascisme, racontée par le biais de personnages saisissants, d’un amour fraternel immense, des déchirures d’une famille. L’écriture de Caminito est à la fois ronde et sensible mais aussi amère et ardente comme une noix que l’on croque trop tôt. C’est beau, prenant, la chronologie déboussolée ne désempare pas… des phrases-poèmes semées dans le roman comme des miettes de pain laissées aux oiseaux. 

« Autour de la ville une broussaille hirsute sur des marches de sang, la lune poursuit les femmes terrifiées. Les loups ont franchi la porte en hurlant. »

à lire ! 

 


Un jour viendra de Giulia Caminito, traduit de l’italien par Laura Brignon pour les éditions Gallmeister ¤ 2021 ¤


 

4 réflexions sur “Un jour viendra ¤ Giulia Caminito

  1. Ceciloule - Pamolico 8 Mai 2022 / 8 h 01 min

    Pas un coup de cœur pour moi mais un très bon souvenir de lecture. Et du coup ça me permet de te découvrir ici après nos échanges Instagram !

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